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Je ne sais pas si j’ai raison, mais je vais quand même essayer d’exposer mon point de vue sur la question, de la façon la plus objective possible. Bref, je dois dire en toute honnêteté que je ne saurais être vraiment objectif car c’est un sujet qui me tient à coeur, quand même!

Partant de mon humble expérience dans le domaine de l’intégration des technologies de l’information et de la communication dans l’enseignement (TICE), je pense qu’en tant que marocains nous avons appris à nous attendre toujours à plus. Je m’explique! Nos personnalités respectives, bien différentes certes, mais aussi convergentes vers l’appartenance à une même société qui cultive et perdure les mêmes moeurs depuis bien longtemps, finissent toujours par impacter notre rapport à l’innovation via les TICE. 

Je dirai donc que nous avons une tendance naturelle à « lever la barre », si vous permettez bien que j’emploie cette expression. Oui, nous levons la barre dans ce sens où nous exigeons bien plus de ce qu’une chose peut nous offrir, ou nous promettre. 

En d’autres termes, nous ne sommes jamais contents, ou plutôt jamais satisfaits. Cela nous pousse souvent à négliger et à sous-estimer tous les efforts que nous déployons et ainsi nous pousse à passer à côté de nos beaux succès, aussi petits soient-ils! 

A la question “comment imaginez-vous l’intégration des TIC dans votre classe?”, la plupart des enseignants auxquels je m’adresse d’habitude sont unanimes : le manuel papier sera éradiqué, le tableau et la craie trop obsolètes pour rester en classe, l’enseignant n’aura qu’à passer des commandes vocales et toucher des surfaces interactives, … et j’en passe. Les choses empirent quand on apprend que ce “changement” devra arriver demain, selon les mêmes répondants, sans plus attendre!

il est clair que le problème réside au niveau des représentations que nous nous faisons de l’innovation, du changement, de l’usage de technologies émergentes (et non « nouvelles », désormais). Le problème se pose aussi au niveau des attentes de chacun par rapport à ce dont il dispose déjà.

Chers enseignants, je vous supplie de bien vouloir capitaliser ce que vous faites déjà, en attendant qu’un ordre nouveau s’installe, en matière d’intégration des TICE. 

Dégustez ces petits moments d’intégration en classe où vous partagez avec vos élèves une petite vidéo, quoique brève. 

Mesurez, à la volée, l’impact d’une fonction de tableur par exemple sur vos élèves et soulignez le fait qu’un logiciel conçu par l’homme peut réduire considérablement du temps, en termes de productivité. 

Sachez dégager l’utilité des annotations à l’encre numérique sur un tableau blanc interactif, si bien sûr vous en disposez dans votre classe ou dans votre établissement.

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Un enseignant innovant ne se définit pas à travers le temps qu’il passe devant son ordinateur à résoudre un souci d’ordre technique. Il ne se fait pas reconnaître aussi à travers sa capacité à faire des prouesses technologiques pour lesquelles d’autres personnes applaudiront, ébahis et envieux. Non! Ce n’est vraiment pas le but. 

Un enseignant innovant est une personne qui sait se réinventer au quotidien en revisitant ses méthodes d’enseignement, ses supports, son exploitation effective et pertinente du temps dont il dispose en salle de cours. 

Un enseignant innovant est une personne qui peut intéresser ses apprenants même dans une salle de cours où il y a une panne de courant, où un vidéo projecteur ne marche plus, où une connexion Internet est morte. 

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Ce n’est pas un cyborg à la tête connectée à plusieurs fils et périphériques bioniques qui sont censés accomplir des tâches qu’un simple humain aux mains nues aurait – déjà – pu exécuter plus efficacement.

Baissons la barre encore. L’infrastructure est importante, il est vrai. Mais la vie continue! Attendre d’avoir un établissement scolaire sur-équipé en matériels et logiciels pour commencer à travailler n’est pas une solution. Au fait, ce n’est même pas une option. 

Ce type de fixation sur un environnement parfait d’intégration a tendance à nous faire oublier que nous disposons déjà d’un minimum. l’exemple le plus significatif, à mon sens, est celui des smartphones. 

Tout en cherchant des terminaux intelligents à écrans larges à « tactilité » avancée avec appareils photos de pointe et systèmes de son de haute définition, nous oublions que nous avons déjà des minis ordinateurs dans nos poches. Bien sûr, pour ceux qui peuvent s’offrir ce type de téléphones couteaux suisses : l’équipement en technologie est corrélatif aussi à l’état de la bourse de chacun, il faut noter. 

Un enseignant innovant commencera alors à pousser les limites de ces équipements de fortune dont il dispose pour enrichir sa pratique au quotidien. Il pourrait commencer, en guise d’exemple, par superviser ses élèves dans le cadre d’un projet de création d’une photothèque authentique au niveau de l’établissement. Il en profitera pour passer différents messages et apprendre à son petit public les bases de la netiquette. 

Ces photos prises par les élèves en utilisant leurs smartphones, triées et indexées en groupe bien encadré, seraient partagées avec le reste de la planète gracieusement sous licence Creative Commons. Idem pour tout autre support audio ou vidéo. 

Actuellement, qu’on le veuille ou non, tout le monde est créateur de contenu numérique

Encore une fois, savourons ce dont nous disposons déjà et faisons du neuf avec du vieux. Le temps est une denrée précieuse qui se raréfie rapidement (nous parlons ici du temps à valeur utile, du temps où l’on travaille, où l’on produit, …) et qu’il faut savoir gérer. Si nous affirmons que ces technologies peuvent nous aider à gagner du temps, il faudra le prouver.

Ne perdons pas de temps à attendre l’inconnu et l’incertain. Ne perdons pas le temps à réinventer la roue en nous livrant à des “prouesses” technologiques. En faisant de la sorte, nous serions en train de concrétiser l’une des devises des Shadoks :

Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué?!

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Au lieu de chercher à concevoir à chaque fois une plateforme hyper-performante d’enseignement-apprentissage en ligne, nous pourrions utiliser ce qui existe déjà « gratuitement ». L’enseignement a tendance à s’ouvrir davantage sur Internet, autant suivre la vague.

Bref, je pense que le message est assez clair, et qu’il serait inutile de continuer à disserter dessus. Chers ex-collègues, regardez bien autour de vous, ouvrez bien l’oeil et prêtez l’oreille aussi : je suis sûr que vous disposez déjà des atouts qu’il faut pour « révolutionner » votre pratique quotidienne. Je dirais même plus, comme dirait les Dupont ou Dupond dans Tintin et Milou, que vous disposez déjà de l’arme la plus redoutable d’entre toutes : Vous-même !

Collégialement Vôtre,

Soufyane Zanfoukh

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